Assurance vie : la clause bénéficiaire face au testament
Bien souvent, l’assuré ne modifie pas la clause bénéficiaire prévue dans le contrat qui s’applique par défaut et qui prévoit que les capitaux seront transmis à ses héritiers légaux. Attention, cela n’implique pas forcément un partage à parts égales entre ceux-ci.
Ce n’est pas parce que l’assurance vie se transmet hors succession que sa clause bénéficiaire règne en maître dans la transmission des capitaux. Lorsque l’assuré a opté pour la clause par défaut – le cas le plus fréquent – au bénéfice de ses héritiers légaux, les capitaux ne leur seront pas forcément attribués par parts égales. Il faut, en effet, tenir compte de ses volontés successorales qu’il a pu exprimé dans un testament. Dès lors, ce document prend le pas sur la clause bénéficiaire.
Le testament plus fort que la clause bénéficiaire par défaut
La Cour de cassation a réaffirmé ce principe dans un arrêt récent du 19 septembre 2018 (1ère chambre civile, n° 17-23.568). Dans cette affaire, une mère de famille ayant trois enfants avait souscrit une assurance vie, au bénéfice de ses héritiers. Elle décède en laissant un testament léguant à l’un de ses fils la quotité disponible de tous ses biens. Pour rappel, cette quotité équivaut à ce qu’il reste quand on a retranché la part minimale que la loi oblige à verser à chacun des héritiers dits réservataires (notamment les enfants). En présence de trois enfants, la part de réservataire de chacun s’élève à un quart, le 4ème quart constituant le quotité disponible. Cette dernière constitue la fraction de sa succession que le défunt est libre d’accorder à quiconque, sans que les héritiers réservataires puissent s’y opposer.
Tirant les conséquences des volontés testamentaires de la défunte que lui avait communiquées le notaire, l’assureur informe le fils qu’il a droit à la moitié du capital de l’assurance vie, puisque ses droits dans la succession sont d’un quart au titre de sa réserve héréditaire auquel s’ajoute un quart au titre de la quotité disponible. Les autres héritiers contestent ce mode répartition devant la cour d’appel qui leur donne raison, au motif que la transmission d’une assurance vie se fait hors succession, le testament ne doit pas intervenir dans son partage selon les juges d’appel. De ce fait les trois héritiers désignés comme bénéficiaires devaient recevoir une part égale de l’assurance vie, à savoir un tiers. La Cour de cassation censure cette décision, les bénéficiaires désignés comme héritiers ayant des droits sur l’assurance en proportion de leurs parts héréditaires.
Les juges suprêmes insistent toujours sur l’obligation de rechercher la volonté du souscripteur quant à la répartition du capital pour appliquer la clause bénéficiaire à bon droit.
© Alexandre Roman – Uni-médias – novembre 2018